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15/11/2023 - Court-métrage

Du 15 au 21 novembre

Les fantômes de l’usine, Réincarnés et Sonámbulo, trois courts-métrages à découvrir dans votre cinéma du 15 au 21 novembre 2023.

“Tu balaies, tu jettes les poubelles, t’essuies les tables et lentement ton esprit flotte.” À quoi pense le jeune balayeur ? à quoi rêve-t-il ?

Belle et émouvante immersion que cette proposition expérimentale signée Brahim Fritah en 2014. L’auteur aime mêler image fixe et image en mouvement, réel et poétique, passé et présent. Depuis le bien nommé Chroniques d’un balayeur, documentaire datant de 1999, il met aussi la lumière sur les invisibles de la société, et toujours avec une bienveillance qui n’empêche pas le regard frontal sur son sujet.

L’émotion naît du récit que les voix narratrices évoquent. Reda Kateb et Yanis Bahloul prêtent ainsi leur timbre au narrateur adulte et enfant. C’est l’histoire d’un passé qui ressurgit à travers la visite d’une usine désaffectée, et à travers les fantômes des ouvriers, du balayeur de tous les souvenirs, et de la famille qui veillait sur la propreté des lieux. C’est un monde d’avant la globalisation et l’ubérisation actuelles.

Le tissage des images filmées et des photographies se double d’effets de montage au pouvoir fortement évocateur. La nostalgie gagne l’écran, même pour le public qui n’a pas connu ces décors et personnages précis. Comme dans Adieu Gary de Nassim Amaouche (2009), l’usine n’est plus, les travailleurs ne sont plus, mais la conscience surgit, tout comme le siècle qu’il faudrait pour “nettoyer l’honneur bafoué des ouvriers”.

Scénario Brahim Fritah


Parmi les places vides d’un parking désert, le néon d’un food truck brille au coeur de la nuit. Accoudés dans le froid, deux hommes attendent leur commande. Ils ne le savent pas encore, mais leur vie est sur le point de chavirer.

Prix de la photographie au Nikon Film Festival 2023, Réincarnés faisait partie des finalistes de la cuvée de cette année, qui avait pour thème le nombre 13. Celui-ci apparaît ici via le nom du foodtruck qui sert de décor à la rencontre des deux protagonistes. Il est en effet un véritable jeu de mots, qui se compose de deux éléments : “Treize amoureux”. Un coup de chance en forme de coup de poker du destin.

Les deux réalisateurs sont deux jeunes acteurs : Hugo Brunswick et Camille Charbeau. Le premier est également producteur de l’aventure, et le second, scénariste et interprète principal, face à Paul-Antoine Chenoz. Le duo singe la romance du Titanic de James Cameron, pour illustrer les retrouvailles nocturnes et imprévues de deux ex amoureux sur un parking désert, autour d’une commande alimentaire.

Les références au triomphe planétaire font leur effet, du pastiche des véritables scènes du film au pendentif en coeur bleu suspendu à un rétroviseur. Les amants mythiques retrouvent donc vie, et l’histoire d’amour enfouie rejaillit, dans un savoureux twist homosexuel, où les clichés sont inversés. Madame hurle au volant pour que monsieur ramène la bouffe, et Monsieur est envahi par ses sentiments pour un autre homme.

Scénario Camille Charbeau Interprétation Camille Charbeau, Paul Antoine Chenoz, Damien Witecka Production Nuits Bleues


Sonámbulo est un voyage surréaliste à travers les formes et les couleurs, inspiré du poème « Romance Somnambule » de Federico García Lorca; une poésie visuelle qui se déploie au rythme d’étranges rêves et de nuits passionnantes.

“Dessous la lune gitane, toutes les choses la regardent, mais elle ne peut pas les voir”. C’est par ces vers extraits du poème Romance somnambule du célèbre poète espagnol Federico Garcia Lorca que débute cette fantasmagorie filmique. Une symphonie de couleurs et de sons, que le réalisateur canadien (d’origine bulgare) Theodore Ushev a orchestré avec une inventivité dingue.

Tout au long de ses quatre minutes et vingt secondes, cette fantaisie animée subjugue, en osmose totale entre fond et forme. Les figures surréalistes se succèdent au rythme des accords musicaux du compositeur bulgare Kottarashky. C’est une véritable fête qui a lieu sous nos yeux. Une ode au mouvement, à l’énergie, à la vie.

On devine des références, des clins d’œil, des hommages, à l’histoire de l’art et à ses créateurs multiples, à commencer par les compatriotes ibériques du poète, Miró et Picasso. Mais aussi à Coco Chanel, avec la petite robe noire étendue dans le final et créée en plein surréalisme, en 1926. Ce feu d’artifice, véritable film d’art, détend les neurones et lave les regards.

Scénario Theodore Ushev Production Unité Centrale

L’Extra Court