Repasse-moi et Un Bug, deux courts-métrages à découvrir dans votre cinéma du 27 juillet au 2 août 2022.
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Repasse-moi, de Ivan Rabbiosi, devant les projections de Incroyable mais vrai
Pedro, un jeune homme sportif, partage sa vie avec une table à repasser. Fidèle, Pedro dort sur sa table à repasser, la dresse avec soin lorsqu’il veut manger, l’utilise pour repasser son survêtement favori et la prend même sous le bras lorsqu’il sort faire son footing. Au village, tout le monde l’admire et le prend pour exemple. Une nuit pourtant, tout va basculer…
Judicieuse trouvaille en animation 2D par ordinateur. Les traits sont simples mais poétiques, de contours noirs en tâches de couleurs. Et le cœur du récit amuse. C’est l’histoire d’un duo inédit d’inséparables : un homme et une planche à repasser. On a vu récemment un frigo phagocyter l’existence d’un humain dans Yves de Benoît Forgeard. Le héros ne peut ici pas se passer de son objet fétiche, qu’il chérit comme la prunelle de ses yeux.
En plus d’être drôle, Repasse-moi est utile. Il enseigne qu’une planche peut servir de lit, qu’on peut lui faire des bisous, et lui monter dessus comme un surf. Cette fantaisie met aussi en scène l’effet de mode, et comment la singularité attire l’attention, jusqu’à créer l’envie. Tous les personnages veulent l’objet adoré, idéal de vie au vu de leur congénère.
Ivan Rabbiosi joue aussi avec malice des amours contrariées. La voisine transie offre inlassablement des fleurs à l’homme insensible à son charme. Le crocodile du zoo craque illico pour l’homme amputé de sa planche, quand celui-ci voudrait que l’animal le croque pour enfin échapper aux humains vengeurs. Mais comme l’écrivait Billy Wilder à la fin de Certains l’aiment chaud, personne n’est parfait. Et un nouveau couple va clore l’aventure !
Scénario Ivan Rabbiosi Interprétation Sandra Vaudroux, Amandine Longeac, Laurent Pasquier Production Metronomic
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Un Bug, de Guillaume Courty, devant les projections de Dédales et Irréductible
En quatre minutes de champs/contrechamps, Guillaume Courty raconte l’enfer kafkaïen de certains chemins administratifs. Un homme, une femme. Un chauffeur de taxi privé de son permis de conduire, une employée de la préfecture effectuant sa tâche professionnelle. Une personne empêchée de faire son travail, une autre en train d’effectuer le sien. Un face-à-face implacable, où la froideur exécutive affronte la quête d’humanité.
Le réalisateur joue la carte du réalisme, dans une simplicité de dispositif, avec le décor central d’un bureau. Il distille rapidement un glissement vers le suspense, avec une montée de la tension dans les dialogues, le ton, le rythme et les gestes. Le thriller social émerge, faisant apparaître les personnages comme des victimes d’un système broyant les êtres humains, avec un “switch” narratif et un quiproquo fatal.
À l’image du cinéma engagé d’un Ken Loach ou d’un Stéphane Brizé, l’auteur se sert de la fiction et des outils filmiques pour témoigner du monde. Il choisit de jouer de la mise en abyme. Le mépris et la méprise sont donc imbriqués pour mieux révéler l’absurdité tragique. Le titre renvoie au moment du déraillement qui débouchera sur le pétage de plomb définitif.
Scénario Guillaume Courty Production Mondayman Productions